Le patronat a un plan : l’extrême droite au pouvoir

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La lettre du 16 septembre 📨

par Pablo Pillaud-Vivien

Le Medef oppose une levée de boucliers à toute idée de redistribution des richesses, quitte à bloquer encore plus la situation politique…. car il a une alternative du côté de chez Marine Le Pen.

« Si les impôts augmentent, il y aura une grande mobilisation patronale, au-delà du Medef », menace Patrick Martin, le patron des patrons. Et de prévenir : les entreprises ne sauraient être la « variable d’ajustement » du budget 2026. La « taxe Zucman », défendue par la gauche, serait « un frein terrible à l’investissement et à la prise de risque », voire « une forme de spoliation ». Le patronat ne se contente plus de faire pression discrètement. Les patrons ont un plan. 

Chaque fois que la gauche a esquissé un projet de redistribution ou d’émancipation, le camp patronal s’est levé comme un seul homme. Dans les années 1970 déjà, à la perspective de l’arrivée de la gauche au pouvoir, les « forces vives de la nation » (mdr !) se coalisaient pour alerter sur la « catastrophe » économique à venir (qui n’est pas advenue). Quelques décennies plus tard, en 1997, la mise en place des 35 heures fut accueillie par une campagne patronale massive, saturant les tribunes médiatiques de prédictions apocalyptiques.

Ces épisodes rappellent une évidence : le patronat ne se vit pas seulement comme un acteur économique mais comme une classe sociale qui défend ses intérêts. Mais à cette tradition s’ajoute aujourd’hui une nouveauté inquiétante. Le patronat ne ferme plus la porte à l’extrême droite : il l’entrouvre, parfois même l’ouvre en grand. Laurence Parisot, présidente du Medef au tournant des années 2010, pouvait encore affirmer qu’« il n’y avait pas de valeurs communes avec le Front national ». Cette mise en garde a fait long feu… Désormais, de grands PDG ou même le patron du Medef rencontrent Marine Le Pen et le Rassemblement national est convié au grand rendez-vous annuel des patrons. Le danger n’est plus l’extrême droite mais la gauche et ses projets fiscaux. De fait, aux dernières élections législatives, le patronat n’a pas appelé au barrage républicain. Il préfère, comme l’écrit Laurent Mauduit dans Collaborations (La Découverte), travailler à amender le programme du RN « afin qu’il s’écarte le moins possible d’une ligne pro-Europe et pro-business ».

Les patrons ne sont pas seulement opposés aux projets de gauche. Désormais ils ont une alternative politique qui leur convient, qui est compatible avec l’idée qu’ils se font du monde, de leur place dans ce monde : celle de chefs qui le méritent. Ils quittent les rives de la démocratie. Et si pour cela, il faut s’allier à l’extrême droite, qu’importe. L’humanité n’est pas leur critère, la justice sociale encore moins. Leur combat : préserver l’investissement, encourager la prise de risque, sauver l’économie. Derrière ces mots, il y a une logique de classe : refuser toute redistribution qui viendrait rogner les profits, même marginalement. Il y a une pensée de la dynamique sociale : elle se doit d’être inégalitaire. 

L’histoire sociale française a montré que les patrons savaient s’opposer aux conquêtes sociales. Aujourd’hui, ils traversent des frontières politiques jugées infranchissables depuis 1945… Actant la déroute de la Macronie, le patronat a un plan B : dealer avec l’extrême droite voire lui paver le chemin du pouvoir. Ce serait la conséquence consciente de leur intransigeance sur le conclave sur les retraites et leur refus catégorique de toute redistribution. L’indignation morale ne suffira pas. Il faut une mobilisation intellectuelle et sociale.

Pablo Pillaud-Vivien

🔴 SOUTIEN DU JOUR

Trump s’immisce dans l’élection municipale à New York

Zohran Mamdani fait peur. Âgé de 33 ans, proche d’Alexandria Ocasio-Cortez et de Bernie Sanders, il a remporté en juin dernier la primaire du Parti démocrate sur une ligne très à gauche – créer des garderies publiques pour les enfants de moins de six ans, augmenter le salaire minimum, accroître les impôts sur les riches… Voir arriver à la mairie de New York un « socialiste démocrate » suscite toutes les inquiétudes. Ainsi, Donald Trump suggère au candidat républicain de se retirer et de soutenir Andrew Cuomo, l’ancien gouverneur démocrate de New York désormais candidat indépendant – mais avec le soutien de Bill Clinton et de l’ancien maire Michael Bloomberg. À noter que Cuomo dispose d’un gros chèque de 25 millions de dollars pour mener sa campagne… Les militants démocrates appellent le parti à prendre fermement position en faveur de Zohran Mamdani. Scrutin le 4 novembre.

C.T.

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« Charlie Kirk, le martyr du trumpisme », sur The Conversation. Depuis l’assassinat de cet « influenceur », les États-Unis sont en mode chasse aux sorcières. D’un côté, les hommages sont lancés à l’excès et, de l’autre, toute critique de Charlie Kirk est synonyme de crime de lèse majesté. Mais qui était cet homme et comment comprendre l’ampleur de l’onde de choc provoquée par sa mort ?

C’EST CADEAU 🎁🎁🎁

D’habitude à Los Angeles, les Emmy Awards sont très politiques. Pas cette année. À deux exceptions près, deux courageux « Free Palestine ». Il y a eu celui de l’actrice Hannah Einbinder, lancée lors d’une remise de prix – on vous l’a mis dans la newsletter d’hier ! –, voilà celui de l’acteur espagnol Javier Bardem.

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