L’énergie, une question carrément populaire

L’énergie s’impose dans le champ politique. Souvent réduite au nucléaire, la question de l’énergie a beaucoup divisé la gauche. Peut-elle aujourd’hui présenter un front sinon uni du moins un brin efficace ? Cela s’imposerait.
Ce lundi, le gouvernement fera une déclaration devant l’Assemblée nationale, suivie d’un débat sans vote, sur la « souveraineté énergétique de la France ». Une programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), attendue depuis janvier 2024, est annoncée pour le mois de juin. Peut-être sera-t-elle imposée par décret. L’audience exceptionnelle de certaines auditions de la « commission d’enquête parlementaire visant à établir les raisons de la perte de souveraineté et d’indépendance énergétique de la France » (parfois au-delà des 2 millions de vues sur Youtube) montre l’intérêt des Français pour ce sujet à la confluence des enjeux de vie quotidienne, de climat et d’industrie.
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Il faut se rappeler que la moitié de notre consommation d’énergie reste d’origine fossile. Sortir des énergies fossiles doit être la priorité absolue à la fois en termes de lutte contre les gaz à effet de serre, de balance commerciale et de sécurité d’approvisionnement. Pour en sortir, trois voies, compatibles entre elles, sont identifiées : développer les énergies de substitution, rechercher l’efficacité et promouvoir la sobriété.
L’énergie de substitution la plus importante est l’électricité. Elle est décisive pour les voitures, le chauffage, certaines industries, la production d’hydrogène. La France est engagée dans le déploiement du nucléaire et des ENR (énergies renouvelables, photovoltaïques, éoliens, hydrauliques pour l’essentiel). Le nucléaire nourrit les controverses, mais il a l’atout de sa puissance délivrée par unité de surface et de matériaux utilisé ; c’est une filière industrielle nationale qui fournit une énergie pilotable. Éolien et solaire sont des énergies renouvelables mais souffrent de deux maux : leur caractère intermittent et la dépendance industrielle vis-à-vis des fournisseurs étrangers. Les solutions à l’intermittence existent dans des scénarios mais ni les batteries pour le stockage à court terme et encore moins l’hydrogène pour un stockage inter-saisonnier ne semblent pouvoir être au rendez-vous.
L’élection de Donald Trump fait basculer le monde du côté des prédateurs, de ceux qui considèrent que la force prime sur la loi et l’intérêt commun. Les ressources de la planète, celles en énergie mais pas seulement, sont clairement l’objet des convoitises de ces prédateurs. La gauche doit se préparer à mener ce combat et, pour cela, hiérarchiser ses disputes internes.
Il faut donc arbitrer. RTE (Réseau de Transport d’Électricité, filiale d’EDF) a produit des scénarios qui permettent ces arbitrages. Le caractère stratégique, l’appétence du public pour ces enjeux, doivent permettre un débat démocratique conclusif (un référendum ?) qui n’élude pas le point central du risque : le risque jamais exclu d’un accident nucléaire catastrophique et celui d’un réchauffement climatique assuré si nous n’abandonnons pas les énergies carbonées.
Mais la part du nucléaire et des ENR n’est pas la seule question. La France dispose, avec ses barrages, d’une production électrique renouvelable et pilotable. Il serait bon que la gauche, toute ensemble, se prononce sans ambiguïté contre l’exigence de la Commission européenne de les privatiser. La gauche pourrait aussi défendre ensemble un projet de réforme de l’aberrant marché européen de l’électricité qui découple les prix de vente du coût de production.
Pour sortir des énergies fossiles, la gauche doit aussi faire valoir les objectifs d’égalité dans la recherche de l’efficacité et de la sobriété. Ainsi, les gains réalisés par l’industrie automobile en termes de poids, de qualité des matériaux ou de performance énergétique des moteurs, ont été dilapidés dans des voitures plus lourdes et parcourant plus de kilomètres. Il manque de régulations en faveur des véhicules plus sobres et des politiques volontaristes réduisant les kilomètres parcourus. Autre exemple : pour que la sobriété devienne la norme, il faut une véritable politique de l’isolation thermique, financée par l’État qui pourrait récupérer l’investissement sur les économies d’énergie à long terme.
Enfin, l’urgence climatique n’est pas la seule raison de présenter un front uni. L’élection de Donald Trump fait basculer le monde du côté des prédateurs, de ceux qui considèrent que la force prime sur la loi et l’intérêt commun. Les ressources de la planète, celles en énergie mais pas seulement, sont clairement l’objet des convoitises de ces prédateurs. La gauche doit se préparer à mener ce combat et, pour cela, hiérarchiser ses disputes internes.