LA LETTRE DU 23 DÉCEMBRE

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Gouvernement Bayrou : à l’impossible nul n’est tenu

par Catherine Tricot

Croyant en sa bonne étoile et en ses capacités politiques spéciales, le premier ministre a annoncé un gouvernement avant Noël. Ce ne sera sans doute pas pour aujourd’hui – on l’espère en respect pour les Mahorais en ce jour de deuil national. Demain peut-être ?

En vérité, on n’est pas à quelques jours près. Ce suspens casse les pieds des journalistes politiques et des programmateurs des chaînes d’info. Les autres attendraient facilement le 6 janvier. Mais bon, François Bayrou veut un gouvernement au pied du sapin. Le problème, c’est qu’il n’y arrive pas. Lui et le président se sont mis dans de beaux draps. Même pas d’idée pour le locataire de Bercy. Laurent Wauquiez a décliné. Le patron des députés LR voulait le ministère de l’économie et le travail sinon rien : il aura donc du temps pour peaufiner sa stature de présidentiable.

François Bayrou avait promis un gouvernement rassemblant les meilleurs : un tiers de gauche, un tiers du centre, un tiers de droite. De la gauche, il ne devrait y avoir que François Rebsamen pour prendre la place de l’invité qui donne bonne conscience. Hier, Didier Migaud n’avait pesé en rien sur la politique du gouvernement Barnier. Il en sera de même avec la participation attendue de l’ancien maire de Dijon, soutien d’Emmanuel Macron dès 2017. On racontera qu’il vient de la gauche et c’est vrai. Comme il n’est pas faux de dire que Jacques Chirac a vendu L’Huma. Cela n’en faisait pas un communiste au moment de l’exercice du pouvoir. 

François Bayrou s’apprête donc à gouverner avec la droite et elle seule. Le gouvernement réunira toutes les nuances de droite. Et les Darmanin, et les Dati, et les Retailleau et les Genevard. Et même les Bertrand (Xavier)… si le couple exécutif soutient le défi que lui a lancé le RN. La nomination du président de la région Hauts-de-France au ministère de la justice devient un test politique. Le premier ministre va-t-il lui aussi se laisser dicter les lignes de conduite par l’extrême droite ? On en frémit, on le redoute. On l’anticipe.

François Bayrou savait la tâche ardue, un Himalaya à gravir, dit-il. Il voulait autour de lui les chefs de parti à qui il a publiquement demandé d’entrer dans son équipe. Il n’en aura aucun. Tous savent que les jours de ce gouvernement sont comptés et sa politique assurément impopulaire. Il se cachent aux abris pour espérer sortir blanc comme neige de l’épopée. Seront donc absents de la photo Wauquiez, Attal et Philippe.

Ce seront donc des marginaux dans leur camp qui gouverneront. Rares sont ceux qui auront pouvoir d’influence auprès des députés de leur parti. Pas plus Élisabeth Borne que Gérald Darmanin. Pas plus Xavier Bertrand que Rachida Dati. Seul Bruno Retailleau garde de l’ascendant auprès des sénateurs LR et Annie Genevard auprès de l’appareil LR. Ils tenteront de calmer les récalcitrants. 

En vérité, François Bayrou ne peut réussir car il n’a fait aucun des gestes qui ouvrent un dialogue avec la gauche. Ni sur le budget où il promet de repartir de celui voté par les sénateurs de droite et qui n’intègre même pas les amendements du Modem ni aucun de ceux proposés par le NFP et votés par l’Assemblée. Et bien sûr aucun geste sur les retraites : il promet un jour sans doute une négociation peut être qui envisagerait probablement d’étudier l’abandon des 64 ans pour tous. 

Bref, le premier ministre est coincé parce que la politique est bloquée. La gauche et la droite n’ont pas la même idée du redressement de la France. Les uns croient qu’il faut considérer les Français et leurs besoins sociaux. Les autres qu’il faut rassurer urgemment les marchés. C’est assez peu compatible.

François Bayrou se veut démocrate mais il ne voit pas que la crise démocratique est aussi une crise politique, celle de la construction d’un projet partagé par une majorité de Français. Il présume de ses forces à surmonter ces antagonismes de vision.

Catherine Tricot

CENSURE DU JOUR

Facebook au service de la propagande israélienne

Dans le marasme du conflit israélo-palestinien, il est coutume de choisir son camp (la paix n’en étant pas un). Meta, la super-entreprise de Mark Zukerberg, qui rassemble notamment Facebook, Instagram et WhatsApp, a donc choisi : une enquête de la BBC révèle que le réseau social a « entravé la visibilité des médias et des internautes palestiniens […] au nom de la lutte contre les discours de haine », lit-on dans Le Monde. « Ainsi, selon la BBC, les pages Facebook de vingt médias palestiniens opérant depuis la bande de Gaza ou la Cisjordanie ont perdu 77% en engagement du public depuis le 7 octobre », rien que ça. Parce que, c’est bien connu, la haine n’a qu’un seul camp… selon le camp d’en face.

L.L.C.

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C’est le débat qu’il voulait avoir. Pendant 1h15, devant deux Youtubers très radicaux, proche de LFI et des antifas, François Ruffin a exposé ses idées sur le combat antiraciste, le PS, la radicalité… Il a explicité ses désaccords avec LFI. L’ambiance de chaudron de cette salle de sport remplie de militants n’est pas toujours sympathique avec le député de la Somme. Mais le débat a eu lieu. Et la cohérence exposée. Intéressant.

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