LA LETTRE DU 7 OCTOBRE
Israël, Palestine : deux peuples étouffés par le fascisme
Le 7 octobre 2023 n’est ni le début ni la fin de l’Histoire, mais un événement qui fera date dans la reconfiguration du monde.
Il y a un an, l’attaque du Hamas contre Israël marquait une bascule dans un affrontement paré d’enjeux extraordinairement élevés. S’agissait-il alors « seulement » d’une étape dans la lutte pour un État palestinien viable ? Avant le 7 octobre 2023, cette question était ensevelie sous des accords commerciaux qui sacrifiaient les Palestiniens. Le Hamas a-t-il remis la Palestine à l’agenda ? On peut en douter. L’ampleur de la défaite palestinienne – qui ne s’origine pas dans le 7 octobre mais que cette date a cristallisée – se prolonge dans un affaissement du droit international, dans un grave éclatement de la gauche à l’échelle mondiale et dans une reconfiguration de l’affrontement entre Occident et reste du monde.
L’incapacité de la communauté internationale à imposer un cessez-le-feu et à empêcher l’inhumanité et ses crimes de s’abattre sur Gaza en dit long sur la solitude des Palestiniens. Depuis 50 ans, les résolutions de l’ONU s’égrènent sans effet. Au nom du droit à l’existence d’Israël, les États-Unis, l’Allemagne et l’Angleterre n’ont pas agi pour retenir le bras du gouvernement de Netanyahou. La France s’est perdue dans ses hésitations pour finalement s’aligner et agir avec retard. La Chine et la Russie n’ont rien fait. Les Syriens, les Tchétchènes, les Ouïghours, les Afghanes et tant d’autres savaient déjà qu’ils ne seraient pas sauvés par les vainqueurs de la Seconde guerre mondiale. Plus personne ne peut rien en attendre. Face à la tyrannie et la violence des guerres, les peuples n’ont plus que le souvenir de leurs espérances. C’est peu. Il faudra faire avec.
Si les États n’ont rien fait, les gauches ont peu fait. Des mobilisations dans les rues de Londres, de Tel-Aviv et sur les campus américains ont tenté de peser. Mais, à gauche, la division a dominé. Les accusations d’antisémitisme sont parvenues à la tétaniser et à la cliver intimement donc profondément. Les gauches se découvrent sans pensée contemporaine sur l’antisémitisme et atteinte par l’indifférence à ce poison. Les réponses bravaches et arrogantes n’étaient pas les bonnes. Ce climat épouvantable a empêché toute réflexion sur les solutions politiques – un État, deux États, une confédération ? – et a entretenu l’incompréhension parmi les soutiens traditionnels à la lutte des Palestiniens. À Paris, les manifestations ont été plus faibles que par le passé. Cette division de la gauche a permis qu’un nouveau délit s’installe, celui qui assimile soutien aux palestiniens et apologie de terrorisme. Des manifestations, des débats sont interdits. Des députés, des étudiants sont inquiétés pour avoir porté le keffieh ou accroché le drapeau palestinien. La bombe à fragmentation contre les libertés publiques, la liberté de penser et de manifester a explosée. La gauche ne peut faire l’économie de rembobiner le film, d’approfondir sa réflexion sur la lutte en faveur des droits des Palestiniens, sur la montée de l’antisémitisme jusque dans ses rangs. Elle doit retrouver le chemin qui fut le sien, celui de l’unité dans les combats en faveur des droits des peuples, contre le racisme et l’antisémitisme. Ou elle périra.
Enfin, cette année qui a vu le soutien logistique et politique des pays occidentaux au régime d’Israël en dit long sur la reconfiguration du débat idéologique qui tend à organiser une vision du monde. Netanyahou s’est présenté en défenseur de l’Occident et de ses valeurs dans un monde arabe et musulman qui lui serait hostile. Comment peut-on tolérer que ce régime abject et d’extrême droite se prévale des valeurs de l’Occident ? L’Occident n’est pas d’un bloc et ne saurait être assimilé à LA civilisation. Mais les principes du droit international et de droits humains ne peuvent être avilis et captés par ce croisé. Le discours éminemment raciste qu’il sous-tend menace nos pays. On ne peut accepter cette nouvelle version guerrière de la lutte des civilisations.
Le 7 octobre 2023 a, de fait, ouvert une page de la lutte mondiale contre le fascisme. Et la Palestine en est un visage.
Catherine Tricot
DOGME DU JOUR
Darmanin veut prendre Barnier par sa droite
Michel Barnier fait face à une opposition qu’il n’avait peut-être pas vu venir : le tandem Attal-Darmanin. La posture est des plus dogmatiques – tant que même Gabriel Attal s’est cru obligé de jurer « Nous n’avons pas baissé les impôts par dogme ou par fétichisme anti-impôts » ! Depuis que le nouveau premier ministre a tracé les grandes lignes de son gouvernement, pas un jour sans qu’il prenne une balle perdue. Dernière en date, ce dimanche 6 octobre, dans les colonnes des Échos : Gérald Darmanin accuse l’exécutif de vouloir « tuer la croissance et créer du chômage de masse ». Plutôt que de toucher aux impôts, l’ex-ministre de l’intérieur préconise de « travailler plus » en mettant « fin définitivement aux 35 heures ». Gabriel Attal partage l’audace. Et voilà les deux macronistes pas mécontents de faire passer Barnier pour un keynésien.
L.L.C.
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Jérusalem 2048, de notre journaliste Loïc Le Clerc. Un recueil de nouvelles, publié bien avant le 7 octobre 2023, qui nous projette 24 ans dans le futur, alors qu’Israël célèbre son centenaire (ou pas). Pour penser la paix… et la guerre.
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La lutte contre la politique du gouvernement israélien dominé par les suprémacistes, les fanatiques religieux et les nationalistes expansionnistes ne sauraient être confondue avec un quelconque antisémitisme. Soutenir la politique actuelle du gouvernement Netanyahou c’est soutenir une politique raciste, belliciste et impérialiste. Cette politique ne peut en aucun cas constituer un avenir pacifié et durable pour le peuple israélien. Netanyahou remporte actuellement des victoires militaires en raison de la puissance phénoménale de son armée, il a besoin de ces victoires pour ce maintenir au pouvoir, mais sur le long terme, nombreux sont les observateurs, y compris israéliens , affirmant qu’Israel perdra la guerre politique. A ce jour, l’immense détresse des victimes des attaques terroristes du Hamas, sert de catalyseur, à la population israélienne, mais elle ne peut servir de base à un règlement du conflit . Netanyahou ne pourra pas poursuivre une politique condamnée par toutes les résolutions de l’ONU, c’est le sens de l’histoire. Il n’y a pas d’autre issue que la Paix dans le respect des droits des peuples israéliens et palestiniens.