L’hôpital est malade et on panse ailleurs

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Les yeux rivés sur ses tableurs Excel, Macron n’est obsédé que par le PIB et la croissance. Et si la santé dirigeait le monde ? Chaque jour, retrouvez #LaMinutePolitique de Pierre Jacquemain.

 

« L’été va être atroce. C’est du jamais-vu ». C’est le très médiatique médecin urgentiste, Patrick Pelloux qui le dit. Selon lui, « la situation est catastrophique ». Et il n’est pas le seul à le penser. Rémi Salomon, président de conférence des présidents des commissions médicales d’établissement de CHU tire, lui aussi, la sonnette d’alarme : « On a un risque imminent de ruptures d’accès aux soins », prévient-il. L’hôpital public est confronté à un problème majeur : celui du manque de personnels soignants. Et il serait faux, ou plutôt incomplet, de mettre ça sur le dos de la seule crise sanitaire. Alors c’est sûr le Covid n’a rien arrangé mais la crise de l’hôpital public ne date pas d’hier. Ça fait des dizaines d’années que les personnels soignants le disent et se mobilisent. Bien avant le Covid, personne ne voulait voir la réalité en face et pourtant quand les médias et les politiques moquaient et méprisaient les cortèges parisiens d’infirmières et les grèves de soignants dans les hôpitaux de France, ils visaient juste. Et ils visaient juste, non pas pour eux et par corporatisme, mais ils visaient juste pour nous, pour les usagers, pour l’avenir de l’hôpital public.

 

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Il aura donc fallu, hélas, une crise sanitaire pour se rendre compte du danger que faisait courir la paupérisation de notre système de santé. L’abandon de l’hôpital public ne date pas de Macron, ses prédécesseurs avaient déjà largement asséché les finances des hôpitaux. Mais quand même… Macron avait promis un moratoire sur les fermetures de maternité. Des services entiers continuent de fermer. Macron avait promis des lits supplémentaires. On continue de fermer des lits. Macron avait promis des recrutements. Ça prend du temps mais le compte n’y est pas. Il avait promis des revalorisations de salaires. Là non plus, pour les syndicats, ça n’est pas suffisant. Et c’est le serpent qui se mord la queue. Faute de personnels, on ferme des lits. Un lit sur cinq est fermé en l’absence de personnels soignants. Et alors que la situation s’aggrave, le gouvernement tarde à réintégrer les médecins, infirmières, aides-soignantes qui avaient été suspendus pour avoir refusé la vaccination.

Le premier problème de l’hôpital est d’ordre budgétaire. Comme le rappelle Salomon : « Quand on fixe le budget de l’hôpital, essentiellement sur des critères financiers, parce qu’il y a la dépense publique, à chaque fois il manque un peu ». Il manque sans doute plus qu’un peu : il manque pour l’acquisition de matériel, l’entretien des bâtiments, la sécurité des personnels. Mais le problème budgétaire cache un autre vrai problème sur lequel ni la gauche, ni la droite ne s’est véritablement penché. Nous ne savons pas penser un système de santé global. Et surtout, penser un système de santé ne peut pas simplement consister à dire que tout repose sur l’hôpital public. C’est un pilier, c’est incontestable. Mais un système de santé digne de ce nom, c’est avant tout un système qui prévient. « Mieux vaut prévenir que guérir », comme le veut l’adage. Prévention, accès à une alimentation saine, à un environnement non pollué, accès à une pratique sportive. Et de ça, personne ne parle.

Plus que jamais, Emmanuel Macron a les yeux rivés sur les indicateurs de croissance et de bonne santé économique. La maison brûle mais on regarde ailleurs : le PIB en l’occurrence. Les patients patientent et les soignants s’impatientent et on regarde ailleurs : le déficit public et la dette en l’occurrence. Et si on faisait autrement ? Sortir de la croissance pour entrer dans la pleine santé. Et si, comme le suggère l’économiste Éloi Laurent, « la santé guidait le monde » ?

 

Pierre Jacquemain

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