Jean de Gliniasty : « Je ne crois pas que les Russes aient l’intention d’envahir l’Ukraine »

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La guerre en Ukraine est-elle imminente ? À quoi joue la Russie ? Pourquoi les États-Unis sont-ils si présents et l’Union européenne absente ? Jean de Gliniasty, ancien ambassadeur de France en Russie, directeur de recherche à l’IRIS, est l’invité de #LaMidinale.

UNE MIDINALE À VOIR…

 

ET À LIRE…

Sur les intentions de la Russie sur l’Ukraine
« On assiste à une négociation sur la sécurité en Europe dont l’Ukraine est le pivot. »
« Les Russes ont compris qu’en ce qui concerne l’Ukraine, le temps jouait contre eux. L’Ukraine devient une nation. Et même la minorité russophone est en train d’adhérer au projet ukrainien. »
« L’Ukraine a une coopération tellement intensive avec l’OTAN qu’elle n’a même pas besoin d’y entrer pour en faire partie. »
« La Russie est prête à échanger sa perte d’influence en Ukraine contre des garanties de sécurité. »
« La Russie est prête à renoncer à son influence sur l’Ukraine. »

Sur le rôle des États-Unis
« L’Ukraine a eu beaucoup d’intérêt pour les Etats-Unis (…). Brzezinski disait : « Si on arrache l’Ukraine à la Russie, la Russie redevient une puissance régionale et cesse de devenir une puissance mondiale. Brzezinski est revenu sur cette analyse mais elle a inspiré très profondément la diplomatie russe ». Actuellement, c’est un peu l’inverse qui se passe. Les américains ne font plus de l’Ukraine une priorité comme ça a été le cas dans le passé. Tout à leur objectif principal qui est de contenir la Chine, les américains sont d’accord sur le fond pour calmer le jeu en Ukraine. »

Sur la possibilité d’une guerre imminente
« Je ne crois pas que les Russes aient l’intention d’envahir l’Ukraine. »
« Quand on fait monter les enchères à la veille d’une négociation importante – ce qui est le cas en ce moment – quand on installe 100.000 hommes, des troupes, le matériel, il y a toujours des risques de dérapage. »
« Il peut y avoir des incidents militaires qui dégénèrent mais je ne crois pas dans un risque de guerre formalisé dès le départ. »
« Les Russes ont menacé d’action diverse mais ils ont dit qu’ils n’avaient pas l’intention d’envahir l’Ukraine. On reproche souvent à Poutine de faire ce qu’il dit et de dire ce qu’il fait, en l’occurrence cette fois-ci, il a dit quelque chose qui correspond à la réalité. »

Sur les sanctions économiques des États-Unis et de l’Union européenne
« Quand les américains disent qu’ils vont appliquer des sanctions terribles, c’est le moins qu’ils puissent dire puisqu’ils ont dit qu’ils n’enverraient pas de troupe en Ukraine. Donc qu’ils ne garantissaient pas militairement l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Donc parler de sanction, c’est un minimum pour les Ukrainiens. »
« Les sanctions n’ont aucune efficacité politique. Ce ne sont pas les sanctions qui changent les décisions politiques. »
« Les sanctions n’ont aucune influence sur la politique russe. En revanche, elles font mal sur le plan économique. Elles font d’ailleurs tout aussi mal à l’Europe et à la France en particulier (…). Donc les sanctions font du mal à tout le monde. »

Sur le rôle de l’Union européenne
« La France et l’Allemagne souhaitaient que l’Europe pèse. Force est de constater que l’UE s’est disqualifiée et s’est mise hors jeu. »
« Il y a entre un tiers et la moitié des Etats membres de l’UE qui estiment que la sécurité de l’Europe est du ressort de l’OTAN et des Etats-Unis. »

Sur les relations Franco-russe
« Il y a une difficulté conceptuelle, un blocage, qui grève l’attitude de la France vis-à-vis de la Russie. Si la France veut passer par l’Europe – comme elle en a la conviction -, la situation reste bloquée. Si la France décide d’agir seule, elle se brouille avec une partie des Etats européens, elle constate la non pertinence de la diplomatie européenne, mais elle arrive à faire quelque chose. C’est un choix difficile : soit c’est l’Europe et il ne se passe rien, on ne fait rien ou pratiquement rien sauf des sanctions, soit on fait quelque chose mais on brise le consensus européen. »

Sur les relations internationales
« Il y a un véritable jeu diplomatique qui se joue entre le monde multipolaire et le monde bipolaire. Les Etats-Unis sont en train, avec succès et une diplomatie que je trouve très habile, de cristalliser ce qu’ils appelaient autrefois le monde libre (…) dans leur rivalité avec la Chine. A ce moment-là, on est obligé de choisir son camp (…). La deuxième option, c’est un monde multipolaire où chacun joue son jeu, joue ses intérêts et échappe à la volonté de certains de cristalliser des alliances – et on sent bien que les Russes sont tentés par ce jeu-là. »
« L’Union européenne joue plutôt le jeu du bloc occidental et la France avec elle. »

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