Ligue des Champions : quand la France révèle au monde son visage autoritaire

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C’est l’affaire du weekend. La finale de la Ligue des Champions avait lieu samedi soir au Stade de France. Rien ne s’est passé comme prévu. La France s’est ridiculisée. La presse étrangère s’en est donnée à cœur joie : « Stade de farce », a ironisé le Sun. Les journalistes présents, Français et étrangers, ont commenté des scènes de « chaos » comme ils ne l’avaient jamais vu. Jusqu’aux élus étrangers qui ont parlé de « honte ». Le député de Liverpool, Ian Byrne, présent à Saint-Denis samedi soir a même déclaré avoir vécu « l’une des pires expériences de sa vie” » Attestant d’une « sécurité horrible » et d’une « organisation qui a mis des vies en danger ». Mais que s’est-il passé réellement ?

 

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Plusieurs facteurs sont à prendre en compte. Dysfonctionnement dans les transports et dans la gestion des flux aux abords du stade en tout premier lieu. Mais surtout, comme l’écrit Jérôme Latta dans Le Monde, la mauvaise appréhension de la préfecture de Police fait peu de doute : « Levée tardive du préfiltrage des spectateurs à l’origine de la congestion ; incapacité à contenir les intrusions illicites ; gaz lacrymogène utilisé sans discernement ; fermeture inexpliquée des guichets concernés ». Les facteurs sont multiples.  Au point que tout le monde s’accorde pour dire qu’une enquête indépendante est nécessaire : de l’UEFA en passant par les collectivités et les élus tout le monde acquiesce.

Tout le monde veut une enquête mais pour le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, pas besoin d’enquête puisqu’il en connait déjà les conclusions. « La faute aux milliers de supporters britanniques », assure-t-il. Les anglais apprécieront. Même imprudence – et on pourrait ajouter même incompétence – du côté de Marine Le Pen pour qui, nécessairement, tout est de la faute des « racailles » de la Seine-Saint-Denis. À quelques mois du mondial de Rugby et à deux ans des JO, la France s’est décrédibilisée sur sa capacité à accueillir des grands événements sportifs mais Darmanin et Le Pen regardent ailleurs.

On peut reprocher tout et n’importe quoi aux anglais mais ils ont au moins appris une chose de leurs drames passés et de leurs erreurs – notamment s’agissant du hooliganisme. Alors qu’en France, on ne compte plus le nombre de lois sur la sécurité nationale et le tout répressif – allant jusqu’à remettre en cause certaines de nos libertés – au Royaume-Uni, on privilégie le dialogue. Le dialogue avec les supporters. En France, il n’y a pas de politique de gestion des supporters. On est dans la réaction. Pas dans l’anticipation. Qu’il y ait une billetterie parallèle n’a rien de nouveau. On le savait. Qu’il y ait des débordements en amont et en aval des matchs n’a rien de nouveau non plus. Et quand on n’anticipe pas, on agit dans la précipitation. La brutalité pour unique réponse.

Les images de violences à l’endroit du public, de gaz envoyé sur les familles anglaises ou de journalistes empêchés, ne passent pas. Elles font mal à la France et à son image. Mais le couple Lallement (préfet de police) / Darmanin, n’en est pas à son coup d’essai. On finit par s’y habituer. A d’autres époques, le fusible Lallement aurait sauté. Il aurait été remercié. Au moins pour le symbole. Pour envoyer un signal : nous avons compris. Nous avons pris la mesure et nous allons y remédier. Mais ça n’est pas le signal que semble vouloir envoyer le gouvernement. Samedi soir, la France a montré au monde son vrai visage : celui d’un Etat autoritaire.

 

Pierre Jacquemain

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