Le nouveau Parlement européen : vous avez dit « équilibres » ?

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Les conservateurs européens sont contents, ils restent en tête et « l’équilibre au Parlement européen ne sera pas bouleversé ». Une vision du monde bien de droite, qui oublie que la gauche s’effondre au profit de l’extrême droite.

« Malgré la poussée de l’extrême droite, l’équilibre au Parlement européen ne sera pas bouleversé. » Cette phrase, tirée ici en exemple de La Voix du Nord, a été en quelque sorte la morale de ces élections européennes pour la plupart des commentateurs. Factuellement, c’est plutôt vrai, mais politiquement, cette musique ne fait qu’accompagner le naufrage.

Qu’en est-il de cet « équilibre » ?

La droite reste en tête à 186 eurodéputés, soit une petite poignée de plus qu’en 2019 (+10). Les socio-démocrates restent deuxième à 135 élus, perdant, a contrario, une petite poignée (-4). L’UE étant fondée sur une alliance entre ces deux camps, avec une alternance des postes clés en bonne entente, effectivement, l’équilibre est sauf.

Hélas, la suite est désastreuse.

Les centristes/libéraux chutent, passant de 108 à 79 eurodéputés. La faute aux libéraux espagnols de Ciudadanos, sortis depuis plusieurs scrutins nationaux du paysage politique, aux Hollandais, aux Roumains, mais aussi de la contre-performance des macronistes. Néanmoins, cela reste suffisant pour que la coalition droite/gauche ait sa majorité.

Les écologistes s’effondrent à 53 eurodéputés (-18), quand la gauche radicale patine à 36 (-1).

Enfin, l’extrême droite peut se payer le luxe d’avoir deux groupes distincts, respectivement à 73 (+4) et 58 (+9) élus.

Tous les groupes de gauche baissent — avec 23 élus en moins, c’est bien simple : la gauche n’a jamais été aussi faible au Parlement européen en pourcentage des sièges – et tous les groupes de droite montent, d’autant plus qu’ils sont extrêmes.

Des 27 pays membres de l’UE, l’extrême droite est en tête dans 5 d’entre eux (France, Italie, Belgique, Hongrie, Autriche) et en embuscade dans 6 autres (Allemagne, Pologne, Roumanie, Pays-Bas, République tchèque, Lettonie). Plus généralement, les partis d’extrême droite progressent dans 17 pays, comme l’a documenté Mediapart.

Mais ceci n’est pas un bouleversement.

« Nous avons gagné les élections européennes », ose même la présidente de la Commission Ursula von der Leyen. Drôle de victoire.

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11 commentaires

  1. Frédéric Normand le 11 juin 2024 à 12:17

    Ursula von der Leyen n’a pas fait de triomphalisme. Son propos, mesuré, ne fait que refléter une réalité politique, celle-là même dont elle devra tenir compte pour la reconduite de son mandat de Présidente de la Commission. Sur ce point, la logique Européenne est similaire aux logiques nationales à l’intérieur des vingt-sept Etats : on ne fait de politique que sur des réalités. Si les politiciens, commentateurs, politistes journalistes et autres tribuns veulent les travestir en jouant sur les mots, les peuples se chargent de leur rappeler ce qu’elles sont. C’est eux qu’il faut écouter.

    Quand la démocratie cesse de plaire à la gauche et à l’extrême-gauche, elle n’en est pas moins la démocratie. Quand c’est l’inverse non plus. Plutôt que de se répandre en anathèmes contre les droites et en appeler à une croisade antifasciste qui n’a pas de point d’application autre que fantasmé, les gauches devraient plutôt réfléchir à la déshérence du socialisme, peu à peu supplanté par le social. Il y a les droites, les gauches, au pluriel, ce qui inclut dans les deux cas les formations situées au bord extrême de ces terrains politiques. Malgré l’évolution des contenus ils gardent leurs balises, même au Parlement européen.

    • Magnus le 11 juin 2024 à 13:51

      « la logique Européenne est similaire aux logiques nationales à l’intérieur des vingt-sept Etats : on ne fait de politique que sur des réalités »

      C’est un point de vue, c’est clair, après moi et beaucoup d’autres ne sont pas d’accord. Par exemple, la soumission aux Etats-Unis n’est pas obligée.

      • Frédéric Normand le 11 juin 2024 à 14:56

        Bien sûr qu’elle ne l’est pas. Toute soumission est une atteinte à la souveraineté. L’OTAN n’est pas une soumission, mais une alliance militaire défensive. A l’origine il s’agissait de protéger l’Europe de l’URSS, qui justement voulait la soumettre comme elle en avait déjà soumis la moitié orientale. Aujourdhui il n’y a plus d’URSS mais il y a la Russie, qui a repris ses attributions, son armement et ses pratiques. Nous devons nous en protéger, faute de connaitre en Europe une paix fondée sur le droit. Qui ne la souhaite ? En attendant qu’elle advienne, il ne faut pas être vulnérable.

        • Magnus le 11 juin 2024 à 20:04

          Vous croyez vraiment que les Etats-Unis vont lancer des bombes atomiques sur la Russie si la Russie met la France et le Royaume-Uni hors fonction ?

          Puis si l’UE ne se soumettait pas au jeu géopolitique des Etats-Unis en Ukraine, il n’y aurait aucun risque d’en arriver là.

          Vous parlez comme si le soutien à l’OTAN est inéluctable. Il ne l’est pas. Juste pour l’élite destructrice américaine.

  2. Frédéric Normand le 11 juin 2024 à 21:14

    Que n’avez-vous posté votre message cinq jours plus tôt ! Il ne s’agit pas de lancer des bombes nucléaires, il s’agit d’être dissuasif. Présenter à l’ennemi potentiel des menaces dont une au moins est mortelle. Résultat, l’URSS n’a jamais attaqué l’Europe occidentale, la Russie non plus. Elle a attaqué l’Ukraine, qui ne dispose pas d’une force de dissuasion. Les enjeux autour de cette guerre n’étant pas vitaux pour les puissances nucléaires qui y sont impliquées, elle n’entre pas dans les cas prévus par leurs doctrines d’emploi respectives de l’arme nucléaire. Et ces puissances, quoique non neutres, ne sont pas toutes belligérantes.

    Croyez-vous vraiment que l’élite américaine soit destructrice par nature ? Allez à Colleville et méditez un instant. Le peuple français a-t-il rejeté à la mer les agresseurs impérialistes américains venus les soumettre ?

    • Magnus le 12 juin 2024 à 22:49

      « Croyez-vous vraiment que l’élite américaine soit destructrice »

      Oui.

      Kennedy dans sa tombe aussi. Tout comme Martin Luther King.

      • Frédéric Normand le 13 juin 2024 à 14:25

        C’est une élite que les Français ont été bien contents de trouver quand elle leur a proposé le plan Marshall.

        • Magnus le 14 juin 2024 à 21:40

          C’est une élite qui opère l’ingérence sans considération pour le pays où elle opère. Le plan Marshall a pu être bien accueilli, après la hausse actuelle du coût énergétique suite à l’utilisation de l’Ukraine et l’UE comme un pion géopolitique, la destruction de nordstream, etc. semble être moins bien accueilli.

          Qui sait, ça finira peut-être par des bombes nucléaires sur la France, alors que les États-Unis seront épargnés, tout comme ils ont été peu touchés par la seconde guerre mondiale et n’ont pas hésité de lâcher des bombes atomiques sur le Japon.

          • Frédéric Normand le 15 juin 2024 à 00:19

            Le plan Marshall répondait à des objectifs économiques. Il ne préparait pas la vassalisation de l’Europe, contrairement à la politique de l’URSS qui a créé des protectorats dans sa zone d’influence. Et d’ingérence. De la vraie. Les Polonais, les Hongrois, les Tchécoslovaques peuvent en témoigner entre autres. Sortir de ce protectorat fut possible quand ils purent sortir du communisme. La France, elle, n’y est jamais entrée, espérons qu’elle continue à éloigner ce spectre.

            Ne parlez pas de bombes nucléaires. C’est le parapluie américain qui nous préserva des menaces soviétiques, sans que nous ayons à prendre les armes au cours d’une guerre chaude. Elle resta froide et les Américains l’ont gagnée. Regrettez-vous de n’avoir pas connu les sort des peuples de l’Europe de l’Est ? Si oui, il y aura peu de monde pour se lamenter avec vous de la défaite du communisme.

            Le rôle des Américains dans la victoire finale contre la nazisme a été décisif. Contre l’impérialisme japonais aussi, lequel n’était pas spécialement tendre. Là, c’est les Chinois qui peuvent en témoigner. Vous ne manquerez pas, je présume, de citer le rôle de l’URSS dans cette même victoire finale, non sans raison : le communisme y trouva le seul titre de gloire militaire de son épopée, et il est cité à l’envi par ses partisans. Les USA accordèrent dans le cadre de la loi prêt-bail plus de 11 milliards de dollars à l’URSS, 31 milliards aux Anglo-Canadiens. Dix-sept millions de tonnes de matériel ont transité par Mourmansk. Cela ne doit pas être oublié, mais vous préférez minimiser et noircir le rôle des Américains. Vous n’êtes pas un historien, vous êtes un militant.



          • Magnus le 18 juin 2024 à 17:05

            Réponse à Frédéric Normand :

            Ce que vous dites ne répond pas à mon simple constat : l’élite américaine au pouvoir ne pense qu’à ce qu’elle estime être ses intérêts.

            L’ingérence américaine en Ukraine ne fait aucun doute. Ni dans plein d’autres pays, démocratiques ou pas.

            Mais ça finira. L’histoire le montre. Tous les empires finissent par perdre le contact nécessaire avec la réalité. C’est ce qu’on voit de plus en plus. A travers la crise dans laquelle se trouve l’Occident.



          • Frédéric Normand le 18 juin 2024 à 22:16

            @Magnus. L’élite américaine a pensé à ses intérêts mais intelligemment : elle a compris que la prospérité des Etats-Unis dépendait de la prospérité de l’Europe, et qu’il fallait donc la relever de ses ruines pour ouvrir de nouveaux marchés à ses produits, tout en acceptant la concurrence des produits européens. Un bon marché est un marché concurrentiel. Rien n’est pire qu’un marché de monopole, même du point de vue de l’entreprise ou de l’Etat qui le détient.

            Telle est la dialectique du gagnant-gagnant, celle-là même que les communistes, en particulier mais pas qu’eux, sont incapables de comprendre. Ils ne raisonnent que par celle du gagnant-perdant. Pour eux l’économie est un jeu à somme nulle. Schéma simpliste, dont l’inadéquation à la réalité provoqua leur perte. Les pays qui refusèrent le plan Marshall, sur injonction de Staline, accusèrent d’entrée un retard sur la voie de la reconstruction économique.

            Alors maintenant la domination occidentale finira un jour. Certes. Tout finira. Elle sera remplacée par une autre. On devine laquelle. L’appelez-vous de vos vœux ? Souhaitez-vous la déréliction de l’Occident, pour lequel votre antipathie transparaît, et la domination de l’Orient sinisé ? Croyez-vous aux vertus de l’Etat chinois, qui viendrait nous guider pour atteindre bonheur, prospérité et démocratie ? A ce jour il n’a pas montré des exemples de philanthropie.



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